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Lundi 4 février, le site d’investigation Mediapart.fr s’opposait à une perquisition de ses locaux. Immédiatement après, Edwy Plenel organisa une conférence de presse et couru les studios de télévision pour crier qu’il s’était opposé à ladite perquisition, décrite par notre « Père la morale à moustache » comme un insupportable « scandale politique » de la justice à la solde du gouvernement Macron. Ce marathon médiatique fut pour Plenel l’occasion de dénoncer la justice autoritaire d’un pouvoir de plus en plus totalitaire.
Alors mettons les choses au clair. Il a suffi que Plenel ouvre la porte pour dire gentiment aux policiers et magistrats d’aller se faire foutre avec leur perquisition pour que le petit groupe aux ordres de qui vous savez retourne dans ses vingt-deux plus vite que le quinze de France devant l’Angleterre. Je ne sais pas dans quel régime autoritaire un gringalet moustachu peut, au calme, envoyer balader la justice de la sorte. En tout cas pas en Corée du Nord, au Venezuela ou en Russie. Mediapart s’en fout et Plenel peut se vêtir de son plus beau costume : celui de David face à Goliath.
Donc au nom de la simple protection des sources, les journalistes peuvent refuser une perquisition. C’est bien la peine de chouiner si c’est si facile… A vaincre sans péril, on triomphe sans gloire. Plenel, qui évoque pourtant ad nauseam la transparence pour tous (la justice, la politique, les patrons…) n’a pas hésité à se planquer.
L’information sale : plus blanc que blanc avec Edwy Plenel :
Alors de quoi s’agit-il dans cette affaire ? Il s’agit d’un enregistrement d’une conversation privée entre Alexandre Benalla et Vincent Crase, réalisé à l’insu d’au moins un des deux protagonistes. Dans cette société médiatique de l’écoute, de la transparence, de la suspicion, Plenel utilise pleinement le procédé qu’il dénonce depuis 30 ans lorsqu’il était écouté par Mitterrand. Mais par une pirouette, il se pose en « lanceur d’alerte », terme pompeux pour désigner les nouvelles balances. Ce n’est pas la première fois que Mediapart a recours à ce type de procédé (affaire Bettencourt, affaire de la Fédération Française de Football…). Plenel qui pleurniche d’être la cible de la justice serait bien avisé de remercier celle-ci de ne jamais l’avoir inquiété pour toutes les violations du secret d’instruction auxquelles il s’est livré.
Pour les journalistes de Mediapart, la fin justifie les moyens. Du coup, les leçons de morale et de déontologie, c’est pour les autres. Mais pour quelle raison la justice a-t-elle perquisitionné Mediapart ? Tout d’abord, les écoutes sont strictement régies par des textes. Dans cette affaire, Le parquet cherche à savoir d’où viennent ces écoutes qui, manifestement, n’émanent pas de la décision d’un juge. Indépendamment de ce que disent ces enregistrements, la manière dont ils ont été obtenus pose question. Pour autant, le secret des sources suffit à laisser les coudées franches aux journalistes et se révèle plus précieux que le secret de la vie privée. L’idée que les journalistes peuvent avoir recours aux procédés les plus malhonnêtes pour faire le buzz, sans risque aucun d’être inquiété, a quelque chose de peu rassurant.
Un cavalier qui surgit hors de Mediapart :
A l’instar d’une Elise Lucet (voir ici) ou d’un Yann Barthes (voir ici) régulièrement pris la main dans le sac à manipulations, les journalistes de Mediapart jouent les Zorros de la morale mais n’hésitent pas une seconde à s’affranchir de toute forme de déontologie.
Un petit mot sur les enregistrements enfin. Tout d’abord, si les propos qui y sont tenus peuvent paraître ahurissants, ils ne doivent pas pour autant agir comme des anesthésiants de notre raison. Dans un cadre privé, on peut utiliser des termes, des intonations ou des gestes que l’on n’aurait jamais utilisés dans un cadre formel. La plaisanterie ou la vantardise auprès de son interlocuteur ne peuvent retranscrire pleinement une pensée que l’on peut supposer insincère. En bref, l’anonymat laisse libre-court à une certaine impunité des mots et des sentiments. Pour quelle crédibilité ? Mediapart s’en moque et tenait là son graal. Plenel et son équipe publièrent les documents puis s’empressèrent, afin de se blanchir, de transmettre les bandes à la justice, se sachant pertinemment protégés par le fameux secret des sources. Mediapart en tirait un immense bénéfice commercial et communicationnel avec un minimum de risque. Bravo Zorro.
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Obtenus de manière frauduleuses, j’espère que ces enregistrements ne seront nullement utilisés contre les deux protagonistes. Mais dans une affaire aussi médiatique, nul doute qu’ils le seront.
En grand moraliste qu’il prétend être, Plenel devrait relire Kant dont l’un des principes de son impératif catégorique était : « Fais en sorte que la maxime de ton action puisse être érigée en loi universelle ».
Victor Petit